ombres - solo - 2 x 20' - 2004
Ombres est une pièce improvisée basée sur un processus. C’est un travail sur la mémoire et sur les territoires qu’elle cache.
Dans cette pièce la danseuse est seule en scène, avec un point de lumière fixe (de hauteur d’homme) sur le fond de la scène, que ses ombres ou sa silhouette traverse par instants.
Le processus
Le processus commence avant présentation par un travail d’écriture authentique. Choisissant au hasard parmi huit questions, la danseuse revient sur un souvenir et écrit sans discontinuer pendant une vingtaine de minutes. Elle se concentre sur un moment de ce souvenir qui n’excède pas 3 à 5 secondes. Ce peut être une scène, une image, une sensation, une émotion, une interaction, ou un échange de paroles.
La proposition consiste à habiter de nouveau cette mémoire et en fouiller les angles pour en tirer une ligne de composition chorégraphique qui opère pendant les vingt minutes suivantes sur scène.
Ainsi comment d’un souvenir ténu peut s’écouler une source de poésie, - et de source devenir fleuve. Ou comment un événement de notre mémoire contient plus qu’il ne semble dire au premier abord, pourvu qu’on le laisse vivre et se développer au gré du mouvement et de la parole. Un peu comme ces tableaux qui contiennent une image dans l’image, ou une clé cachée sous forme de personnage ou d’un signe dont il faudrait déchiffrer l’énigme.
Une approche mixte
Ombres fait ainsi converger le verbe, le mouvement, et le travail sur la voix, dans le souci d’extraire le sens le plus complet de la situation et de l’instant, et tel qu’il se livre sans forcer par des images suggestives, des correspondances imprévues et des allusions fortes.
Les enjeux et le thème de la mémoire
L’écriture est d’abord un travail d’amorce, et, dans ce processus, le souvenir en question est liée au moins à une personne précise, si bien que le solo est en quelque sorte un duo avec un partenaire invisible, ou avec un double inconscient.
Le souvenir ne peut pas être refusé ou censuré, et quelle que soit sa nature, et ses risques - qu’il soit banal ou terrible -, il fait partie du processus de garder confiance dans la justesse du souvenir, et enfin dans la justesse de l’instant, dont il sortira transfiguré.
Parce qu’aucune mémoire n’est jamais finie, et participe à tout moment du présent, Ombres met à nu et au vu de tous le comportement de cette mémoire vivante et fuyante à la fois...
De même qu’on ne traverse jamais deux fois le même fleuve, la danseuse ne traverse jamais deux fois le même lieu de mémoire, et chaque solo est unique, bien qu’il poursuive le même chemin d’exploration - ou qu’il puisse se produire dans le même lieu.
Le public par sa présence et son écoute crée à sa manière l’environnement perméable à l’invocation de cette mémoire en cours, et devient le porteur sensible de cet inconscient.
Ombres, de fait, bouscule les niveaux de lecture et renvoie le spectateur à l’ambiguïté de ses perceptions et à ses propres dérives d’interprétations, et il existe une interaction véritable entre la danseuse et le public. En lui offrant et lui permettant ainsi de vivre l’effet miroir:: il devient le reflet - comme un miroir - de ces « ombres » qui nous habitent tous.
La thématique
La thématique de l’ «ombre » fait allusion à ces parties de soi que l’on a laissées « dans l’ombre », et qui portées à la lumière (celle de la scène) changent soudain d’aspect et de sens, jusqu’à s’adoucir. Suivant la métaphore, nous sommes un peu comme une grande maison. Il y a des pièces que nous ne visitons plus ou dont nous avons perdu la clé. Des pièces dont nous croyons qu’elles referment une peur tandis qu’elles referment de la lumière. A moins que cette peur justement ne soit une forme de lumière, ou disons tout simplement un passage...
Le temps de ce passage sur scène, Ombres offre une chance à cette mémoire insoupçonnée ou difficile. Et la scène elle-même devient un peu ce lieu parfait, idéal, étrange à la fois de mystère et de transparence...
diffusion :
- 24 juillet 2005 : Stanica Zilina – Zariecie (Slovaquie
- 22/24 mars 2005 : filage professionnel au CND, Paris
- 28 février & 1er mars 2005 : Théâtre Jean-Vilar, Bourgoin-Jallieu, France
- 21 mars 2004 : Théâtre Jean -Vilar, Bourgoin-Jallieu, France
- 2 octobre 2003 : Polli Talu Art Center, Vatla, Estonie
presse :
“Claire Filmon, une très belle danseuse, dans un spectacle d’improvisation baptisé “Ombres”, qui par sa grâce et son énergie, son talent aussi, a su captiver une jeunesse d’abord bien dissipée dans les travées du théâtre Jean Vilar (...) Bribes de phrases alliées à une expression corporelle pleine d’inspiration ont créé son histoire. Celle d’une présence tangible, profonde, sensible, féline...”
Ch. P “Le Dauphiné Libéré”. 3 mars 2005